S’il il y a bien un sujet dont on n’a pas cessé de parler chaque jour en France, c’est bien le sentiment d’insécurité qui se propage partout dans le pays. Les affrontements terrifiants entre communautés tchétchènes et maghrébines survenus à Dijon le week-end du 13 juin 2020, avaient mis en évidence l’impuissance de nos forces de l’ordre qui se retrouvaient dans un climat inhabituel d’affrontements urbains face des groupes parfois armés d’armes de guerre. La conclusion de cette histoire est, elle aussi, un sacré désaveu sur la crédibilité et la fermeté de l’État pour faire respecter l’ordre public puisque ce conflit ne s’est pas réglé dans le bureau du Procureur mais par une “paix” qui a été négociée entre les deux communautés dans une mosquée du coin.
Depuis lors, des faits de violence ont été quotidiennement relayés par les médias à Paris, à Toulouse, à Palavas-les-Flots, à Bordeaux et tant d’autres villes encore. Comme celle de Bayonne où on ne peut oublier le décès tragique de Philippe Monguillot, ce père de famille et chauffeur de bus qui s’est fait frapper, gratuitement, car il demandait à l’un de ses passagers de porter le masque, obligatoire dans les transports en commun.
Cette violence apparaît désormais à chaque évènement, aussi bien pour un match du PSG en Final 8 (dernier carré exceptionnel de la coupe européenne des clubs en raison de l’épidémie de la COVID-19) que lors de la manifestation des soignants. Concluant ces évènements par des pillages divers et des affrontements avec les forces de l’ordre.
Cette augmentation de la violence n’est pas qu’un ressenti, elle est réelle et chiffrée. En 2019, les taux de violences sexuelles et d’homicides ont augmenté respectivement de 12 et 9 % en un an. Ce qui fait que la France se classe parmis les pays les plus violents d’Europe d’après le classement établi par Eurostat.
Les dépositaires de l’autorité publique ne sont pas épargnés non plus. Déjà victimes d’attaques injustes lors de manifestations d’indigénistes et de racialistes factieux d’extrême-gauche les accusant d’être les auteurs de violences, mais aussi de meurtres, suite au tragique décès de George Floyd, tué injustement des mains d’un policier américain à Minneapolis dans le Minnesota. Ils sont désormais les cibles de délinquants qui n’ont même plus peur de défier l’autorité de l’État.
En effet, on estime que près de 800 agressions contre les dépositaires de l’État ont lieu chaque jour, et aussi qu’un refus d’obtempérer à lieu toutes les 30 minutes. Ces forces de l’ordre sont aussi devenus les victimes des délinquants. C’est le cas de la si jeune Mélanie Lemée, gendarme dans le Lot-et-Garonne tuée par un chauffard récidiviste. Mais aussi à ce brigadier de 43 ans, père de famille tué au Mans.
Cette perte de légitimité de l’État se ressent d’autant plus avec les récentes et inquiétantes agressions de maires de France, élus et représentants de la République.
Un tel ensauvagement de la société a plusieurs origines. La première, une fracture sociale immense causée par une “archipélisation” en diverses communautés de la société française. Diverses communautés aux cultures et origines différentes qui vivent ensemble sans jamais se parler, laissant ainsi la place à la violence. La seconde, une forte appétence des jeunes générations à s’affranchir de toute autorité, qu’elle soit familiale ou scolaire. L’État ne fait pas exception à ça, ce qui l’empêche de faire respecter l’ordre. De plus, un État qui depuis la récente crise sanitaire, ne fait que montrer qu’il n’arrive pas à gérer ses missions propres, étant parfois supplanté par les régions voire même les communes. Ce qui ne fait qu’accroître la déficience des citoyens envers les capacités de l’État à être l’État, ce qui affecte forcément son autorité envers les citoyens.
Mais surtout, un manque cruel de moyens pour nos forces de l’ordre. En effet, selon Eurostat, la France est en 2018 l’un des pays qui consacre la plus faible part de ses dépenses publiques à l’ordre publique et à la sécurité (environ 3 %) alors même qu’elle a des effectifs policiers ramenés à la population bien plus supérieurs que la moyenne européenne.
La justice n’est pas épargnée non plus. Pour 1 000 € de dépenses publiques, seulement 4 € sont attribués à la justice. Une justice qui tourne au ralenti, inefficace : 30 % de la population carcérale est en attente de jugement, il faut compter deux ans entre l’ouverture d’une information judiciaire et le renvoi d’un accusé devant la Cour d’assises. Selon une étude du Conseil de l’Europe de 2018, en France les deux tiers des affaires où la justice est saisie sont classées “sans suite”. Mais aussi, plus grave encore, près de de 100 000 peines de prison sont en attente d’exécution. Il fait donc redonner à la justice les moyens pour pouvoir travailler dans des délais convenables et avec des peines respectées.
Ceci ne peut pas être attribué uniquement à un manque de moyens puisqu’il existe une certaine conception de la justice pour une partie de la gauche qui consiste à penser qu’une justice clémente permettrait aux délinquants de comprendre leurs méfaits par le seul fait d’être passés devant elle et que cela suffisait pour qu’ils arrêtent de commettre des délits. Ce laxisme s’est parfaitement illustré durant l’épidémie avec la décision folle de la Garde des Sceaux Nicole Belloubet de libérer 6 600 prisonniers dans la nature pour “motif sanitaire”. Ce qui n’est pas dénué d’idéologie puisque pour eux, la meilleure solution pour lutter contre la surpopulation carcérale (qui s’élève à 120 %) est donc de vider les prisons plutôt que d’en construire de nouvelles, au risque de libérer des criminels, qui peuvent devenir récidivistes, dans la société.
Les magistrats aussi ne sont pas tous exempts de tout reproche. Depuis, l’évènement du “mur des cons”, on sait bien qu’une bonne partie des membres de la magistrature est politisée, guidée idéologiquement par la nécessité du laxisme de la justice au détriment de la justice elle-même. Un laxisme, qui n’est en réalité qu’un manque criant de sévérité face aux délinquants. Des délinquants qui sont à nouveau condamnés dans les huits ans pour 40 % d’entre eux selon une étude de mars 2014 du ministère de la Justice sur le passé et le devenir pénal de 500 000 individus.
Une fois le constat dressé on ne peut qu’être angoissé, et on peut légitimement demander que quelque chose soit fait au plus vite. Puisque, si rien n’est fait, c’est la base même du contrat social qui se retrouvera caduque. Car si les citoyens ont décidés de se soumettre, en donnant une part de leur liberté, à l’État c’est pour que celui-ci garantisse en échange leur sécurité pour éviter la loi de “tous contre tous”. Sans contrat valide, c’est le retour à l’état naturel décrit par Hobbes et le règne de l’anarchie.
Il est donc important d’agir. Agir en s’inspirant, par exemple, de ce qui a été mis en place à New-York dans les années 90 par Rudy Giuliani avec la “tolérance zéro”. Il faut que chaque délinquant soit puni avec fermeté, même pour un “petit délit” car, comme l’illustre l’adage “Qui vole un œuf, vole un bœuf.”, il n’y a pas de “petits délits”, il y a des délits. Pour mettre cela en place, il faut avoir beaucoup de courage : avoir le courage de mener une réforme de la justice pour leur octroyer de plus grands moyens ; avoir le courage de cesser de vider les prisons de ses condamnés et en construire de nouvelles pour les futurs condamnés ; avoir le courage de soutenir nos forces de l’ordre ; avoir le courage de réaffirmer l’autorité de l’État ; avoir le courage de s’attaquer au cœur du problème.
Face aux violences, la seule réponse possible de l’État c’est la fermeté. Les Français souffrent déjà de temps de maux, inutile de leur rajouter la peur d’une potentielle agression gratuite dans la rue. Face à ça, les mots, les déclarations et les tweets de dénonciation ne suffisent pas. Il faut des actions et surtout, des résultats.
Théo Dutrieu