(Entretien) Julien Aubert (LR), « Il faut (…) rétablir notre lien national »
(Entretien) Julien Aubert (LR), « Il faut (…) rétablir notre lien national »

(Entretien) Julien Aubert (LR), « Il faut (…) rétablir notre lien national »

Julien Aubert est Député Les Républicains du Vaucluse et Président d’Oser la France.

Le tirage au sort utilisé par Emmanuel Macron pour la Convention citoyenne sur le climat est-il d’inspiration gaulliste ?

Je ne me rappelle pas qu’en juin 1940, nous ayons tiré au sort les résistants…

Le souverainisme est-il redevenu à la mode ?

Le souverainisme sera au cœur de l’élection présidentielle 2022. Nous aurons besoin d’un candidat qui incarne le retour à l’esprit de Nation face au macronisme qui, lui, représente un individualisme exacerbé sur fond de mondialisme mal digéré. Emmanuel Macron tente d’avoir le ton et les mots du Général de Gaulle, mais, malheureusement, n’est pas le Général de Gaulle qui veut. Il n’a pas non plus réellement compris ce qu’était le concept de souveraineté. Lors d’un discours, il parlait même de souveraineté nationale et européenne, deux termes antinomiques au possible. Comment peut-on être propriétaire collectif et individuel à la fois ? 

La destruction des cadres sociétaux au profit du communautarisme et de l’individualisme n’est-il pas finalement représentatif de l’échec du Général à combattre mai 68 ?

Mai 68 n’est qu’un symptôme. La tendance de fond est la French Theory : des sociologues inspirés par le marxisme sur la superstructure, qui ont imaginé qu’il fallait déconstruire les structures pour libérer l’individu. En réalité, en détruisant les structures fondamentales, ils ont isolé l’individu dans des identités qu’ils revendiquent comme singulières et minoritaires. On aboutit ainsi aux mouvements néo-fascistes que nous connaissons aujourd’hui : ils essentialisent les individus par rapport à leur genre ou à leur couleur de peau.

La crise citoyenne n’est-elle pas le fruit également d’un manque d’incarnation de l’Etat ?

La crise citoyenne est plutôt, à mon sens, le fruit d’un problème d’instruction et aussi d’éducation. La transmission des valeurs républicaines n’est plus assurée. S’y joint l’apparition d’un matérialisme entraînant les citoyens à prioriser leurs besoins personnels. On peut aussi y ajouter la crise démocratique, liée à une crise de l’efficacité ; les citoyens pensent que le vote ne sert plus à rien.

L’abstention devient reine en France. On associe souvent celle-ci avec le Traité de Lisbonne de 2007, où le référendum de 2005 n’a pas été respecté. Peut-on retrouver la confiance des Français envers la politique ?

Pour réussir cette démarche, il faut absolument introduire le concept de « responsabilité ». La responsabilité du chef d’Etat devant le peuple doit être assumée jusqu’à l’extrême. Il faut introduire également le concept de « souveraineté », et donc d’efficacité. Ces concepts ne fonctionneront que si nous faisons comprendre aux gens que la démocratie est fragilisée par toute une série de dévoiements démocratiques au nom de l’Etat de droit – alors que c’est plutôt un gouvernement des juges – et que la situation ne pourra être corrigée avant d’avoir clarifié les moyens d’action. Enfin, la politique meurt d’un manque d’authenticité dans un monde de communication.

La crise sanitaire a-t-elle démontré que le sabotage de notre industrie – en opposition avec l’œuvre gaullienne – est une catastrophe ?

Cette crise a démontré que les socialistes qui parlaient d’une France sans usines et d’une économie de services avaient totalement tort. Sont coupables en particulier ceux qui ont pris le pouvoir avec la gauche plurielle de Lionel Jospin. La vision néo-marxiste de l’ouvrier industriel victime du système capitaliste est toujours notre fléau. Ils ont voulu libérer l’individu et parlaient d’une société de loisirs. Aujourd’hui, le constat, c’est que nous vivons surtout dans une société de dépendance envers l’extérieur.

Le néolibéralisme a-t-il démontré ses limites ? Doit-on revenir vers un gaullisme social ?

Nous pourrions déjà appliquer un vrai libéralisme : libérer l’entreprenariat, la libre entreprise, effectivement mieux clarifier ce qui relève du public et du privé. Je combats ce néolibéralisme dont la doctrine efface l’Etat au profit de la mondialisation et donc de la logique de marché. L’Etat est essentiel car c’est lui qui préserve la liberté de l’individu. Nous devons arrêter avec l’ouverture commerciale à tout crin. Le dogme de la libre concurrence est en train de détruire totalement nos champions nationaux. La privatisation à fait parfois les choux gras de certains opérateurs sur le dos des citoyens.

Par rapport à une politique sociale, elle est assez compliquée à mettre en œuvre dans la mesure où les socialistes ont sali le terme. Lorsque les citoyens pensent au mot « social », ils l’associent directement à l’irresponsabilité, à la démagogie et à l’augmentation des impôts. Il faudrait plutôt être plus solidaires dans notre politique, considérer que désormais certains publics sont plus vulnérables que d’autres, et qu’une société se mesure aussi à sa capacité à aider ceux qui en ont le plus besoin : le vrai demandeur d’asile qui fuit la guerre et non celui qui profite de ce droit pour migrer en France, le travailleur licencié en raison de la crise et non celui qui fait du chômage son travail… Comme souvent, il existe dans les interstices de notre système de protection des gens qui en profitent et bien des Français sont tentés de tout jeter par-dessus bord, ce qui à mon avis serait une régression. La différence avec la vision de la société d’Emmanuel Macron, c’est que cette dernière est individualiste alors que nous la voulons collective à travers la Nation.

Existe-t-il un laxisme de l’autorité étatique ?

D’un côté, ce qui échappe à l’Etat, c’est que l’on a importé des populations en France qui ont des mœurs beaucoup plus violentes que les nôtres. Je pense notamment à des sociétés qui ont été confrontées à la guerre ; c’est le cas notamment des Tchétchènes ou de certains pays d’Afrique. Ce phénomène se conjugue avec l’élimination de la violence par la société : désormais les jeunes ont une approche de la violence par les jeux vidéo ou par la télévision, ce qui mène à une sorte de fascination morbide pour l’ultra-violence. Ce sont des gens qui ont recours à la violence mais n’ont pas conscience des conséquences morales de leurs actions : c’est le cas du gang des barbares. Ils sont désocialisés car ils n’ont peut-être pas reçu les principes moraux liés à la vie en société. D’autre part, nous avons une justice bien trop bienveillante et des prisons surpeuplées. On a donc peur de recourir à la prison. Une idéologie gauchisante s’est aussi particulièrement développée par rapport au fait que la prison ne serait pas une solution, n’éduquant pas les prisonniers. La prison n’est pas créée pour rééduquer ou réinsérer mais bien pour isoler les individus dangereux pour la société. 

Comment la droite de demain doit-elle s’approprier le gaullisme ?

Le gaullisme n’est pas à droite. Le mot a moins de résonnance pour les plus jeunes. Je pense qu’il existe un vrai espace politique pour un mouvement républicain qui désire redonner au peuple français sa capacité à diriger. Nous devrons aussi écarter toute une élite qui s’est trop souvent trompée et nous explique en même temps qu’elle est la plus capée pour diriger. Le plus important est de rétablir notre lien national, ce qui nous permettrait de construire un destin ensemble ; réinstaurer l’amour de notre histoire, de notre pays, de notre géographie. Il faudra pour cela sortir de cette culture de la repentance. Pour réussir ces missions, nous avons besoin de laboratoires et Oser la France se place dans cette ligne. Le mouvement a pour vocation à accueillir tous ceux qui veulent encore « oser » l’avenir de leur pays, miser sur leur pays et pensent qu’aimer la France est une transgression en 2021.

Propos recueillis par Paul Gallard pour Droite de demain.

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