Martial Bild est journaliste, directeur général de TVLibertés.
Bonjour monsieur Bild, la France est désormais totalement à droite, les sondages le montrent, comment expliquer ce basculement idéologique encore très improbable en 2019 ?
La situation politique de la gauche en France est clairement catastrophique. Je ne vais pas faire preuve d’originalité en indiquant que cette descente aux enfers correspond au moment où le sociétal a pris le dessus sur le social. L’idéologie woke, la cause des racisés, les revendications LGBT ont pris le pas sur la défense des travailleurs et des vraies luttes sociales. Cette mue mortifère et volontaire a fait fuir le monde ouvrier et plus largement la fameuse « France qui se lève tôt ». La gauche a aussi trahi ses électeurs en niant les problèmes quotidiens et cruciaux que sont l’insécurité, la précarité, les violences, l’immigration et l’islamisme. Cet aveuglement va se payer « cash » dans les urnes où sept candidats vont se partager le vote résiduel de gauche.
La bataille culturelle est-elle remportée par la droite quand on voit que même la gauche parle désormais d’immigration et de sécurité ?
La gauche n’a cessé de piétiner et de criminaliser les notions d’identité et de souveraineté. Pire, elle a suscité ou approuvé toutes les lois liberticides, toutes les atteintes aux libertés publiques. Elle n’est donc absolument plus crédible quand elle s’empare, maladroitement et pour des raisons électoralistes, de thèmes essentiels comme l’immigration ou l’insécurité.
Si la gauche est en déclin sur le plan politique, elle reste profondément dominante sur le plan intellectuel. La gauche impose encore ses diktats culturels et moralisateurs. Elle dispose de bastions culturels grassement subventionnés ou des citadelles audiovisuelles, je pense au service public, qui lui permettent de verrouiller l’information à son profit. La gauche moralisatrice est convaincue qu’elle seule possède la vérité et que le peuple se trompe et doit être rééduqué ! Regardez le comportement de France Inter, c’est l’illustration, au quotidien, de ce que je dis.
La presse alternative est un contrepoids important à cette oppression, à cette doxa assénée par la gauche dans tous les médias à quelques rares exceptions. TVLibertés a réussi en quelques années à donner la parole à des personnalités et des spécialistes en dissidence avec le prêt-à-penser, à des intellectuels et des experts qui démontent les mensonges et les manipulations, aux journalistes qui fournissent une information vérifiée, libre et indépendante. Ce travail porte ses fruits et permet d’engranger des records d’audience comme en février avec plus de deux millions de visiteurs uniques et des journaux télévisés culminant à plus d’un demi-million de téléspectateurs. On peut dire que TVLibertés est un modeste mais vrai contre-pouvoir.
Un phénomène important est en train de monter, celui de la montée d’une droite dite identitaire que vous incarnez avec TV Libertés, comment vous définiriez cette droite ?
L’identité est une dimension essentielle et primordiale, mais TVLibertés se veut le carrefour de tous les défenseurs de l’esprit français et de notre civilisation. Nous cherchons à faire tomber toutes les barrières qui séparaient les plus sincères en différentes chapelles prétendument irréconciliables. Et à mettre en avant ces personnalités qui s’opposent aux dogmes officiels et qui préfèrent défendre leurs idées que de se plier à l’emprise médiatique dominante qui a souvent les caractéristiques du totalitarisme, fût-ildoux. TVLibertés, c’est le rassemblement de tous les esprits et les cœurs avides d’une alternative.
Surtout, cette droite monte par des nouveaux canaux de discussions et d’informations tels que YouTube ou Twitter, voire Discord. TVLibertés s’est fait connaitre via YouTube. Comment avez-vous flairé ce basculement ?
L’ère nouvelle ouverte par l’internet représente pour tout l’immense champ de l’activité audiovisuelle et intellectuelle, l’équivalent de l’invention de l’imprimerie par Gutenberg. Il s’est constitué un nouvel espace de liberté mais surtout un dépassement des vecteurs traditionnels de communication : les médias de caste uniformisés et dogmatiques. La chute des coûts de production a aussi permis la naissance de TVLibertés, il y a plus de huit ans. Nous étions donc au bon endroit et au bon moment. Et c’est ainsi que TVlibertés a inventé et développé une télévision de troisième type : ni alimentée par l’argent public, ni dépendante de subventions, ni propriété d’un milliardaire.
Est-on en train de voir, en ce moment, cette droite exploser à travers la figure d’Éric Zemmour avec énormément de jeunes à ses côtés dans les meetings ?
L’élection présidentielle est un temps passionnant pour s’intéresser à la politique. J’ai constaté, comme vous, que les meetings populaires d’Éric Zemmour attiraient une importante mobilisation de jeunes et même de très jeunes. L’enjeu est de faire de toute cette jeunesse qui se rebelle contre les idées molles, des électeurs. Réponse le 10 avril !
Êtes-vous d’accord avec la notion de « primaire sauvage de l’extrême droite » entre Marine Le Pen et Éric Zemmour ?
Je conteste totalement la notion d’« extrême droite ». Ce terme péjoratif est utilisé de manière partisane à des fins de sidération des Français. Le seul extrémisme que je vois en action en politique, c’est celui violent et guerrier de la gauche. Ou sinon le prêt-à-penser omniprésent de l’extrême-centre macroniste.
Quant à la confrontation entre Marine Le Pen et Eric Zemmour, je l’observe comme vous. Elle ne peut se comprendre que dans la volonté de certains de dépasser 2022 et de se projeter dans les cinq années à venir en faisant sauter le verrou entre la droite libérale et la droite nationale. Et en pariant sur la disparition des vieux partis. Là encore, nous serons rapidement fixés.
Quelle analyse faites-vous des quatre candidats de la droite (Pécresse, Zemmour, Dupont-Aignan et Le Pen) ?
Si l’on veut bien mettre de côté Valérie Pécresse, on doit noter l’excellence, et s’en réjouir, des candidats de droite et patriotes. On connaissait le volontarisme de Nicolas Dupont-Aignan, on savait l’expérience de Marine le Pen, on observe la remarquable capacité d’Eric Zemmour de se fondre dans l’habit d’homme politique et d’homme d’Etat. La vraie désillusion – certains diront qu’elle était prévisible – provient de Valérie Pécresse qui mène une campagne calamiteuse et sur le fond et sur la forme. Il se pourrait bien qu’elle signe la mort définitive des Républicains déjà bien mal en point.