Philippe Juvin est médecin, maire de La Garenne-Colombes et candidat au Congrès Les Républicains.
Vous êtes le candidat des services publics, pourquoi ?
Je revendique une droite qui soit le défenseur des services publics. C’est une colonne vertébrale pour notre pays, et surtout une garantie que toute la population française accède aux mêmes services de manière égalitaire sur tout le territoire. Ces services, lorsqu’ils sont efficaces, sont aussi un gage de prospérité du pays. Quand vous avez une école, une sécurité, une justice et des routes qui fonctionnent, vous avez un pays qui peut se développer. Je ne diminuerai pas le nombre de fonctionnaires, je ferai en sorte qu’il y en ait moins dans les bureaux, mais plus au contact des citoyens. Croyez-vous vraiment, alors que nous sortons d’une crise sanitaire sans précédent, lors de laquelle nous avons manqué cruellement de médecins, d’infirmières, de policiers ou de juges, que l’on peut diminuer le nombre de fonctionnaires ? Ce n’est pas raisonnable.
Quels sont les enseignements à tirer de la crise sanitaire ?
Les conséquences de cette crise ne concernent pas que la santé. C’est avant tout la leçon que notre système est trop centralisé, hyper-bureaucratisé, très peu agile et incapable de réagir vite. S’agissant de notre système de santé, si nous y mettons énormément d’argent, trop peu de ces deniers vont en direction des soins. Il y a une statistique de 2016 : au sein deshôpitaux publics français, il y a autant de temps plein administratif que de temps plein médecin. L’hôpital public va très mal, avec énormément de patients qu’on ne peut pas soigner. Nous pensions avoir le meilleur système de soin au monde, nous nous sommes lourdement trompés. Mais la pandémie a démontré notre échec dans d’autres nombreux domaines. Aurions-nous pensé deux minutes ne pas pouvoir fabriquer les masques ? Amputer nos libertés au point où le citoyen ne pouvait acheter certains produits au supermarché ? Nous devons tirer les enseignements de cette crise.
Nous devons mettre fin au chaos régnant, redonner de la liberté aux Français et recréer un nouveau modèle de prospérité. C’est ce que je propose.
Comment relancer notre système de santé ?
Dans son rapport, la Cour des comptes exprime que notre système de santé n’a pas tenu mais a improvisé. Admettons qu’il ait tenu ; il l’a fait non pas par les ordres venus de Paris mais par les individus qui le composent : infirmières, aides-soignants et médecins se sont organisés eux-mêmes. J’en tire deux leçons. L’Etat doit effectuer son travail dans son domaine et efficacement : dans la justice, l’éducation, la sécurité. Dans les autres domaines, je suis favorable à ce qu’on laisse les individus exprimer leurs potentialités, leur intelligence. Laissons les chercheurs chercher, les enseignants choisir leur propre méthode d’apprentissage, les entrepreneurs être libres d’entreprendre. Je suis pour un changement de paradigme denotre société. Les individus sont une source de richesses mais il faut pour cela les laisser s’exprimer.
N’avez-vous pas peur d’être catégorisé comme un médecin et non un politique ?
Je suis flatté d’être ce « candidat médecin ». La crise du coronavirus est la seule crise du XXIème siècle qui a stoppé complètement l’activité du pays et celle de la planète ; la question de la santé est primordiale. Ce serait complètement incohérent de sortir de cette crise et de ne pas placer la santé dans les priorités. Je suis médecin, certes, mais je suis également maire. J’ai été député européen et mes expériences ne se cantonnent pas à ma profession de médecin. Par exemple, je sais en tant que député européen ce que nous devons à l’Union européenne mais également ce qui doit être changé au sein de ses institutions. En tant que maire, j’ai vu à quel point le local est primordial à l’équilibre de notre système politique… Un certain nombre de personnes me cataloguent, mais j’ai de nombreuses expériences humaines qui m’ont amené à servir mon pays. Je n’en peux plus de cette classe politique qui ne fait que du commentaire alors qu’on la paie pour apporter des solutions. Moi, j’en apporte, comme maireet comme médecin.
Quel avantage avez-vous d’être le seul maire de ce Congrès ?
Il y a 500 000 conseillers municipaux en France, pour la plupart bénévoles, qui s’occupent du bien public. Quand vous êtes conseiller municipal ou maire, vous l’êtes 24h/24. Vous êtes souvent le seul interlocuteur des personnes seules. Nous sommes des élus habités par le sentiment de l’intérêt général et par le souci de proposer des solutions concrètes au vivre-ensemble. Un maire qui se contenterait de commenter l’actualité n’effectuerait pas son travail. En cela, les maires sont des interlocuteurs essentiels dans notre pays. Gérard Larcher disait que d’une certaine manière, ce sont les maires qui ont permis à la République de tenir au moment des Gilets Jaunes. Être maire, c’est aussi ne pas avoir besoin de sondagespour savoir ce que pensent les Français car nous travaillonsauprès d’eux. Je suis le seul candidat de ce congrès à être maire. Cela me donne une certaine sensibilité concernant les services publics locaux, sur le sujet des déserts médicaux. Je mettrai sur la table des sujets concrets et dont les maires maîtrisent les enjeux. Les citoyens exigent de vous des solutions, c’est de la démocratie directe. Oui. C’est un avantage d’être maire.
En tant que Président de la République, quelle serait votre première action à l’échelle européenne ?
Il est important de préciser que le Président, une fois élu, devient aussi président de l’Union européenne pour 2 mois. Je convoquerai le Conseil de l’Europe autour de deux sujetsmajeurs : les enseignements du Brexit pour en éviter de nouveaux départs, établir ainsi un Schengen 2 entre les Étatsqui souhaitent la même politique migratoire. Dans un deuxième temps, je mettrai sur la table un projet de traité entre la France et les pays africains dans une optique de plan d’investissement massif en direction des infrastructures. La vague migratoire dont tout le monde parle n’est rien comparé à celle qui pointera le bout de son nez dans trente ans. Il faut que nous stabilisions le continent africain. On peut le faire,mais cela ne peut être fait qu’à l’échelle européenne avec les fonds d’investissements régionaux.
Quelle est votre proposition phare de ce congrès ?
Je veux sortir de cette politique du coup, de la proposition. Je crois davantage à l’expression d’une vision, qu’à un ensemble de réflexions complexes. Tout d’abord, nous devons reprendre le contrôle dans notre propre pays. Cela passe par les questions de sécurité, d’immigration et les questions financières. Deuxièmement, il faut redonner de la liberté aux Français. Il y a une fuite importante de nos talents : l’exemple de l’entreprise de vaccins obligée de délocaliser en Ecosse est flagrant. Enfin, il faut réinventer un nouveau modèle de société en enrichissant à la fois intellectuellement et économiquement. Pour ce faire, il faut s’attaquer aux impôts de production, qui tuent notre industrie, et à la question des retraites qui est centrale. L’absence de capitalisation collective dans le financement des retraites conduit à une retraite de plus en plus chère. Avec cette capitalisation collective, nous aurions des retraites trois fois supérieures.
Quelle était votre vision de la droite en commençant la politique ?
J’ai commencé la politique en m’engageant dans l’associatif, j’organisais des tournois de futsal. Je suis après devenu conseiller municipal puis maire. Je lisais beaucoup, notamment les mémoires de Winston Churchill et de Charles de Gaulle, j’ai alors compris qu’il y avait des gens qui avaient une certaine idée de la France. J’avais une idée de la France comme nation assez généreuse qui tend la main aux plus modestes, mais exige en contrepartie une responsabilité individuelle. J’aiderai toujours les autres. En revanche, avec ceux qui profitent du système, je serai impitoyable. Dans cette optique, le livre du magistrat Charles Prats, Cartel des fraudes, est éclairant tant on y comprend les enjeux de la fraude sociale. Nous sommes 68 millions de Français et pourtant nous versons une allocation sociale à près de 74 millions d’individus. Le pire : tout le monde s’en fiche. Je n’en peux plus de ceux qui n’agissent pas.
Quel projet économique ?
Au niveau du constat, je vois deux sujets. D’abord le réchauffement climatique : celui qui n’y crois pas n’est pas à la hauteur des enjeux. Pour réduire notre empreinte, il faut décarboner le pays – qui n’est pas le plus mauvais élève, loin de là. Cela doit se faire par l’électrification de notre consommation en passant par l’énergie nucléaire ; je n’aurais jamais fermé Fessenheim. Emmanuel Macron a arrêté les programmes de recherche sur les déchets. Cependant, nous n’aurons jamais assez d’énergie électrique en se concentrant sur le nucléaire, le renouvelable est en ce sens important. Un deuxième sujet, concernant l’écologie au sens large : la Santé. Je veux faire de la santé un enjeu global. L’OMS parle de « One Health », en particulier sur les sujets de nutrition et de qualité d’air que l’on respire. La santé environnementale sera l’un de nos objectifs dans les années à venir.