Pierre Cordier est député Les Républicains de la 2ème circonscription des Ardennes.
Bonjour Monsieur le député, pouvez-vous nous présenter votre parcours politique ?
J’ai 47 ans, je suis marié et j’ai deux enfants. J’ai l’honneur d’être Député de la 2ème circonscription des Ardennes depuis juin 2017. Auparavant, j’ai été maire durant 16 ans de Neufmanil, petite commune de 1200 habitants (de 2001 à 2017). J’ai également été Vice-président du département des Ardennes durant une quinzaine d’années. J’ai eu la chance de diriger le service de sécurité et incendie des Ardennes (SDIS) mais aussi d’être Vice-président de l’agglomération Charlevilles-Sedan. J’ai commencé mon engagement politique dès 19 ans en adhérant au RPR, puis en militant pour ce parti. Mon parcours donc à la mairie, au département et à l’Assemblée Nationale sachant que j’ai aussi eu la chance d’être collaborateur parlementaire, assistant de groupe dans un Conseil Régional, montre que ma vie a toujours tourné autour de la chose publique, autour du service à la population car pour moi, « faire de la politique » c’est servir en donnant le meilleur de soi-même. Mes administrés le ressentent, et je pense que c’est pour ça que j’ai gagné 8 élections d’affilées sans en perdre une seule depuis 1999, dans un secteur assez compliqué car c’est un territoire traditionnellement à gauche. Cela prouve que nos concitoyens votent avant tout pour des personnes, et que, quand on fait son job, les gens ont de la reconnaissance.
Vous siégez à la Commission des Affaires Etrangères, vous avez notamment travaillé sur les firmes transnationales, est-ce que vous pensez que les états ont un moyen d’action contre elle?
« Panama papers », « Swiss leaks », « Offshore leaks », « Paradise Papers », « Lux Leaks », et plus récemment « Cum Cum » et « CumEx »… Depuis dix ans, les scandales fiscaux se sont succédés sans que le grand public ne sache comment les services du contrôle fiscal ont traité ces dossiers. Tous mettent en lumière des montages fiscaux transfrontaliers de haut vol, avec à la clef des dizaines de milliards d’euros évaporés de leurs pays d’origine.
Pour faire la lumière sur ces scandales, j’ai été nommé par la Commission des Affaires étrangères co-rapporteur d’une mission sur l’évasion fiscale qui a mené de nombreuses auditions durant 8 mois.
Dans le rapport que j’ai présenté avec Emilie Cariou, députée de la Meuse et membre de la Commission des finances, nous avons dressé un bilan de l’action de l’administration fiscale, de la Justice, du Parquet National Financier, et de la coopération internationale, montrant les faiblesses et progrès de chacun. Nous avons ensuite fait une trentaine de recommandations pour mieux lutter contre les montages fiscaux transfrontaliers qui pénalisent notre économie et sont une injustice pour tous les Français, particuliers ou entrepreneurs, qui paient honnêtement leurs impôts.
Doit-on mettre en avant une harmonisation fiscale des pays pratiquant une fiscalité faible ?
Il y a quelques jours nous avons évoqué ce sujet dans un groupe de travail sur les entreprises piloté par mon collègue Olivier Dassault. Nous recevions le patron d’une grande entreprise qui évoquait la question des normes en matière fiscale, mais aussi les normes environnementales. C’est vrai que nos entreprises croulent sous ces normes et qu’on a besoin de simplification et d’une harmonisation à l’échelle européenne. Il faut prendre conscience que cette harmonisation est fondamentale pour les prochaines années sinon l’idée d’Europe sera de moins en moins acceptée et cela encouragera les extrêmes et le populisme. Nous chez Les Républicains, nous avons notre rôle à jouer. Même si certains sont plus sceptiques sur l’Europe, je dis souvent que l’Europe c’est avant tout la paix, et pour un habitant des Ardennes – terre qui a connu la guerre – c’est fondamental.
Quel est votre avis sur l’accord des chefs d’état de l’UE sous l’impulsion d’Emmanuel Macron pour taxer les GAFAM ?
Emmanuel Macron et son Ministre de l’Économie Bruno Le Maire se penchent beaucoup sur ces questions, comme leurs prédécesseurs. Je ne peux que m’en réjouir si on peut trouver des accords, mais les tensions entre la France et les USA me font douter. Si la taxation des GAFAM aboutit à un matraquage douanier de nos exportations de vins, de champagne, de viandes bovines et de fromages, ce n’est pas la peine ! Dans le contexte international actuel, ça peut avoir des conséquences terribles pour nos agriculteurs. Tout le monde se souvient des conséquences de l’embargo russe lors de l’affaire ukrainienne… on a interdit les exportations vers la Russie, ce qui a fait du mal à certains producteurs français. Il faut donc faire attention, que ce soit un accord global. Malheureusement, quand on voit la difficile communication entre Donald Trump et Emmanuel Macron, on se rend compte que ce n’est pas si simple que ça… Il en est de même sur les questions environnementales. Bien-sûr la France doit participer aux efforts, mais il faut être conscient qu’on ne réglera pas tous les problèmes de la planète en faisant du tri sélectif et en imposant des voitures électriques. Ce ne sont pas 65 millions d’habitants qui régleront le problème de 7 milliards. Et pour cela il faut aussi que la France prenne conscience qu’elle ne représente que 0,88 % de la population mondiale et que nous ne sommes plus la première puissance dans le Monde…
Est-ce que la France même avec l’UE peut réellement lutter contre les USA économiquement ?
Nous n’avons pas réellement de politiques communes en matière d’Affaires Etrangères, même si parfois nous parvenons à avoir une position commune sur certains conflits. Quand on travaille sur ces questions économiques, il faut être pragmatique et se rappeler qu’on ne pourra avancer que si nous sommes unis face au géant américain.
Vous avez interpellé le gouvernement sur le matraquage fiscal pratiqué par Emmanuel Macron et ses ministres, peut-on réellement sortir de cette fiscalité lourde ?
Contrairement aux idées reçues, nos concitoyens ne sont pas réticents à payer l’impôt quand ils savent ce qu’on fait de cet argent. J’ai été maire durant 16 ans, j’ai augmenté les impôts 3 fois en 17 budgets (ce qui reste assez faible), mais quand j’augmentais les impôts je faisais preuve de pédagogie et de transparence. J’augmentais pour payer l’emprunt lié à une salle polyvalente, adapter une salle de classe avec du matériel informatique et les gens m’ont suivi parce qu’ils m’ont fait confiance. Tout le monde dans sa vie peut se retrouver dans une situation compliquée, liée à divers facteurs, et il faut que la société soit solidaire de ces personnes. Mais il faut aussi que l’argent soit utilisé à bon escient. Ce n’est pas normal qu’avec des allocations de rentrée scolaire des familles aillent acheter des télévisions ou des DVD au lieu des fournitures scolaires et vêtements nécessaires pour les enfants. Ces aides devraient être mieux fléchés et orientées. Et d’autant plus avec le matraquage fiscal d’Emmanuel Macron qui a commencé avec les retraités par l’augmentation de la CSG et la désindexation des retraites. L’Etat n’a pas d’argent, il est obligé d’emprunter pour fonctionner, pour payer ses fonctionnaires. Si j’avais du emprunter pour ma mairie afin de payer les secrétaires et les entretiens des espaces verts je me serais posé des questions ! L’impôt doit être payé à juste mesure mais ne doit exclusivement peser sur ceux qui travaillent. Bien-entendu je suis pour la progressivité de l’impôt étant d’une droite sociale. Plus on gagne de l’argent plus on doit payer d’impôts. Mais il n’est pas normal que ceux qui ne travaillent pas et bénéficient de la solidarité nationale ne contribuent pas, même symboliquement.
Pour vous, qu’est-ce que la droite de demain ?
La « droite de demain » c’est avoir un seul et unique leader qui représentera nos couleurs aux élections présidentielles. A l’heure actuelle, tout le monde sait qu’on va tout droit vers un nouveau duel Marine Le Pen/Emmanuel Macron et moi je me battrais jusqu’au dernier moment pour ne pas retrouver ce scénario de 2017 ! Pour cela il faut des idées, il faut travailler avec tous les élus sur 5 à 10 idées fortes afin de monter un programme solide pour les Présidentielles. La personne pour l’incarner viendra après, le plus important c’est le fond. Je fais confiance au Président des Républicains Christian Jacob pour assurer cette première étape, car il a l’expérience pour refaire des Républicains un parti politique plus fort. Des idées fortes, du militantisme, du travail dans les départements. Pour cela il faut faire vivre leurs fédérations à travers les présidents de Fédération, secrétaires départementaux et responsables de circonscription. Même si on sait que le militantisme a perdu de sa splendeur ses dernières années, le meilleur moyen de faire vivre la démocratie c’est le mouvement politique, c’est l’agora et c’est grâce à ça qu’on fait remonter des propositions. Il est important de venir militer, échanger, débattre pour construire ensemble ce programme.
Propos recueillis par Paul Gallard pour Droite de Demain.