(Interview) Yves d’Amécourt (Force Républicaine), « Notre écologie est basée sur une nouvelle gouvernance qui refuse l’idéologie »
(Interview) Yves d’Amécourt (Force Républicaine), « Notre écologie est basée sur une nouvelle gouvernance qui refuse l’idéologie »

(Interview) Yves d’Amécourt (Force Républicaine), « Notre écologie est basée sur une nouvelle gouvernance qui refuse l’idéologie »

« Chasse pêche nature et tradition » devient le Mouvement de la Ruralité. Il est rejoint par un certain nombre d’élus locaux, notamment Yves d’Amécourt, Maire de Sauveterre-de-Guyenne, Conseiller Régional de la Nouvelle-Aquitaine, membre du bureau politique de Force Républicaine en charge de l’environnement, de la ruralité et de l’agriculture.

Bonjour Yves d’Amécourt. Pourquoi ce changement de nom ?

En fait ce n’est pas tout à fait un changement de nom puisque CPNT avait comme sous titre « Le mouvement de la Ruralité ». Aujourd’hui, on sent bien qu’il faut élargir la problématique à toute la ruralité et ne pas s’intéresser seulement à la défense de la chasse de la pêche, de la nature et des traditions. Notre mode de vie est attaqué de toute part par un Etat devenu très urbain dans ses modes d’action et de gouvernement.

Plus largement, notre souhait est que le bon sens rural, les valeurs que porte le monde rural, puissent  de nouveau inspirer les politiques nationales ! On a un véritable enjeu devant nous et c’est l’objectif de notre mouvement.

Vous souhaiter lui redonner un peu de visibilité aussi ?

Oui, lui redonner de la visibilité. Vous savez, 40% des français habitent dans le monde rural et aujourd’hui ils se sentent un peu les oubliés de la République. On a l’impression que la France est en train de se « métropoliser ». Or le modèle d’une France constituée de métropoles avec des satellites n’est pas notre modèle. Nous pensons au contraire que l’avenir de la France est dans les zones rurales et que l’on peut s‘y développer et aller chercher des points de croissance.

Notre mouvement ne souhaite pas simplement défendre le monde rural, mais s’appuyer sur les atouts et le développement du monde rural pour développer la France. Nous pensons que l’homme est un « animal rural » par nature et que c’est dans le monde rural que l’on trouve le bonheur.

Nous croyons à l’aménagement et  à la connexion entre les territoires, au respect des cultures et des traditions dans nos régions pour des valeurs solides comme socle d’une nation durable ! Nous croyons à la complémentarité des talents  et nous refusons la standardisation de la France ! La nation est une et indivisible mais nos territoires sont divers et différents ! C’est une richesse.

Et aujourd’hui, vous avez l’impression que l’on ne vous entend pas ? Que l’on n’écoute pas le monde rural sur la scène politique nationale ?

On ne l’entend pas car le monde médiatique national est organisé autour des chaînes d’info en continue qui ne donnent la parole qu’aux habitants de l’Île-de-France !

La France ne se résume pas à l’île de France !

Cette problématique rurale est complètement inaudible. C’est bien dommage parce que nous avons beaucoup de chose à dire ! Il y a des questions qui sont posées sur la table : l’écologie, l’environnement, le vivre ensemble. Sur ces questions nous avons notre vision des choses. Or les réponses qui sont actuellement apportées, notamment au parlement, sont des réponses très urbaines.

Nous préférons les écologues aux écologistes !

Notre écologie est basée sur une nouvelle gouvernance qui refuse l’idéologie, redonne à la science sa juste place, s’appuie sur le bon sens, pour un développement durable et acceptable, qui s’appuie sur notre connaissance de la nature, l’intelligence des consommateurs  et les savoir faire des hommes, notamment nos agriculteurs et nos forestiers.

J’entendais il y a quelques jours qu’une métropole se donnait un objectif de réduction des déchets de 10% dans un quartier… Nous, dans notre zone rurale, nous les avons réduits de 40% depuis 2015 ! Peut-être que l’on pourrait s’inspirer de notre façon de faire ?

Justement, Yves d’Amécourt, qu’est-ce qui fait que vous, élu local, vous avez décidé de rejoindre ce mouvement de la ruralité ?

En fait, je connais Eddie Puyjalon depuis longtemps. J’étais dans les manifestations des chasseurs sur le champ de mars contre les lois Voynet à la fin des années 90. Nous travaillons ensemble au Conseil Régional de Nouvelle-Aquitaine.

Pendant les primaires de l’élection présidentielle François Fillon m’avait chargé, avec d’autres, de rédiger son programme pour l’agriculture. Une fois le programme « pour une agriculture forte et conquérante » arbitré et validé par François Fillon, j’en étais devenu l’ambassadeur avec mon ami Xavier Regnaut. De l’avis général, c’était le meilleur projet qu’on n’ait jamais eu pour l’agriculture dans une élection présidentielle depuis 30 ans.

Nous avons fait le tour de France pour expliquer ce programme aux agriculteurs. Cela se faisait dans des réunions de granges, où nous rencontrions uniquement des agriculteurs. Chaque réunion durait deux heures et on n’y parlait que d’agriculture. Personne n’avait jamais vu ça auparavant.

Après les primaires, François Fillon m’a demandé de faire le même travail sur le monde rural. C’est un travail que nous avons animé avec Guillaume Rivalland qui arrivait lui de l’équipe de Bruno Le Maire. Puis je suis reparti sur la route pour expliquer ce programme aux élus ruraux.

Depuis les élections Présidentielles, Bruno Retailleau m’a confié, au sein de FORCE REPUBLICAINE l’animation des réflexions sur l’Environnement, la Ruralité et l’Agriculture.

Tout cela permet de créer une certaine convergence : l’absence d’intérêt pour le monde rural dans les grands partis politiques, la volonté d’Eddie Puyjalon de créer le mouvement de la ruralité avec une trentaine d’autres personnes qui sont dans toute la France, mon appétence personnelle pour ces questions là, mon travail au sein de Force Républicaine, ont fait que l’on a trouvé une synergie et qu’on a la volonté de construire ensemble.

Défendre la ruralité c’est assez vaste ! Quels sont vos principaux chevaux de bataille ? De quoi voulez-vous parler ?

L’Etat, aujourd’hui, est en train de se poser des questions pour savoir comment réduire son budget de fonctionnement pour augmenter l’investissement. Il est vrai que tous les impôts des Français partent dans le fonctionnement et que l’Etat n’a plus d’argent pour investir, aménager le territoire. L’aménagement du territoire est quelque chose qui est très cher aux zones rurales.

Sur la communauté de communes que je préside, qui représente 50 communes rurales en Gironde, la charge de la fonction publique communale et intercommunale par habitant est de 250 €. Elle est de 500 € en France et de 750 €/habitant dans les zones urbaines !

Sur une meilleure gestion des deniers publics, nous avons aussi des choses à proposer !

Comment fait-on ? Nous avons beaucoup d’élus locaux, environ 500 sur un territoire de 17000 habitants, qui sont investis. Ils sont, pour la plupart d’entre eux, bénévoles. Dans nos petites communes le lien social existe. La solidarité et le vivre ensemble, ne sont pas des mots vains. Et puis nous avons de nombreuses associations, environ mille, dont 750 sont actives, dans tous les domaines : le sport, la culture, le lien social, … Autant d’activité, qui, dans les zones urbaines, sont réalisées par des agents de la fonction publique.

Dans les zones rurales, les impôts sont plus bas, mais les habitants participent à la vie de la cité sous d’autres formes. Le bénévolat y est très développé pour le bonheur de tous.

Quel est, selon vous, un plan d’avenir pour les zones rurales ?

Nous voulons un aménagement responsable des territoires qui ne confonde pas démographie et démocratie, qui redonne du sens à l’action dans un périmètre à taille humaine. Cela passe par la réorganisation des collectivités territoriales, le développement des infrastructures économiques, des transports, des équipements sportifs et culturels, du logement, par la réduction de la fracture numérique ainsi que le renforcement du développement économique sur l’ensemble des territoires.

La France tourne le dos au monde rural !

Aujourd’hui, le PIB de la France ne progresse qu’en Île-de-France ! C’est là que se fait toute la croissance du pays ! Rien d’étonnant, la France a perdu, depuis 30 ans, ses industries de 1ère  et 2ème transformation. Trop de nos produits agricoles et forestiers sont transformés hors de France. Notre projet est de réindustrialiser la France par les territoires. Cela permettra le développement de nos zones rurales et donnera des emplois à ses habitants et renforcera les filières de production locales.

Pour nous la dignité de chacun vient de sa place dans la société, notre objectif, c’est le plein-emploi ! Tous nos voisins sont au plein emploi. Il n’y a pas de raison valable pour que la France n’y soit pas. Il y a du travail pour tout le monde en France. On manque de monde dans les entreprises du bâtiment et de la restauration, dans les exploitations agricoles, chez les artisans et les commerçants. Il y a en France, des départements exemplaires de ce point de vue : la Vendée, la Mayenne, la Manche, le Cantal … Ce devrait être une source d’inspiration pour nos gouvernants.

La France compte 6 millions de chômeurs. Le plein emploi reviendrait à remettre au travail 4 millions de personnes, c’est la population active de l’Autriche ! Le PIB de l’Autriche, c’est 400 milliards d’€uros !

L’enjeu est d’augmenter le PIB de la France de 400 milliards d’euros !

En France on aborde toujours le sujet de l’emploi de manière défensive. On parle plus de chômage que d’emploi. On se demande comment financer le chômage avec un PIB qui n’augmente pas. Au lieu de se demander comment on pourrait augmenter le PIB en s’appuyant sur le travail du plus grand nombre.

L’enjeu du plein emploi, c’est la croissance, c’est l’emploi, c’est l’éducation et la famille, et c’est le paiement des retraites de nos aînés ! C’est la priorité des priorités !

Pensez-vous que les habitants des zones rurales se sentent méprisés comme le dit le mouvement des gilets jaunes ? Vous vous adressez aussi à eux ?

Très clairement, les « gilets jeunes » du 17 novembre, on était parmi eux. C’était des artisans, des commerçants, des agriculteurs, qui travaillent 80 heures par semaine et qui n’arrivent pas à se verser un SMIC ! Des couples des classes moyennes qui gagnent entre 2500 € et 3000 € par mois et qui n’arrivent pas à joindre les deux bouts et qui passent à coté des aides dont bénéficient leurs voisins.

Nous partagions leurs revendications. Je me suis exprimé sur ces sujets très souvent et depuis longtemps dans mes différents mandats.

Cette taxe sur le carburant qui devait s’appliquer surtout aux habitants des zones rurales, quand nos impôts et nos amendes servent à financer des transports collectifs dans les zones urbaines, la mauvaise qualité des transports régionaux (TER, bus), les radars qui fleurissent sur nos routes départementales et la limitation de la vitesse à 80 km/h … Tout cela n’est ni juste, ni équitable.

Après cela, le mouvement des gilets jaunes a dérivé vers des mouvements plus violents. Des groupes extrémistes se sont infiltrés dans leurs actions. C’est regrettable. Mais le mouvement originel je l’ai soutenu dès le départ, dès les premiers appels à manifester, parce qu’il correspond à ma vision des choses à ce que je ressens.

Maire de Sauveterre, depuis 11 ans, j’ai reçu en Mairie plus de 3000 personnes. Les problèmes du quotidien, comme tous les élus ruraux, je les connais.

Vous savez, on n’arrête pas d’entendre dans le débat national que les petites communes coutent cher, que le déficit de la France serait dû à ses 36000 communes ! Ce sont des balivernes ! Je suis prêt à en débattre avec des maires de métropoles et avec des ministres !

La France rurale, elle ne coûte pas cher. Elle est organisée. Elle a un lien social très fort. Il y a une solidarité qui existe encore dans nos zones rurales qui n’existe plus au niveau national. Elle peut servir de modèle. Quand il y a eu les épisodes de canicule, c’est dans les zones rurales qu’il y a eu le moins de soucis parce que les familles étaient là. Quand il y a une tempête, les élus sont à pied d’œuvre avec leurs tronçonneuses pour dégager les routes et porter secours. Il y a chez nous une solidarité de voisinage, une solidarité familiale, qui n’existent plus dans les villes.

Pour répondre aux objectifs que se fixent nos gouvernement année après année, sur la solidarité, sur la sécurité, sur la gestion des données publics, il y a un modèle qui marche : c’est notre modèle rural !

Au lieu de promouvoir ce modèle, parce qu’ils ne le comprennent pas, ils n’ont de cesse de vouloir le casser !

Les cantons ont tellement grandi qu’on n’y croise plus les conseillers généraux. On a fait grandir les communautés de communes qui sont devenu difficiles pour conserver ce lien.

On a confondu démocratie et démographie.

A chaque fois qu’on allonge les distances, on abîme la démocratie ! Parce qu’on enlève de la compréhension et du lien.

Lorsque je vais à Limoges ou à Poitiers pour une réunion de la Région Nouvelle-Aquitaine, ou lorsque mes collègues  de Poitou-Charentes ou du Limousin viennent à Bordeaux,  on se dit que cette grande Région n’a aucune réalité ! Quand on regarde les comptes et que l’on constate que, depuis la fusion, les dépenses ont augmenté… On se dit que les technocrates qui ont imaginé cette grande Région XXL nous emmènent sur une route que l’on ne veut pas emprunter.

Cette grande Région est moins efficace et elle coûte plus cher ! Tout le contraire de ce que demande le peuple !

A un moment ou a un autre il faudra revenir sur ces grandes régions, sur ces grands cantons, sur ces grandes communautés de communes. Tout cela est abracadabrantesque !

Qui reviendra sur tout ça ? Qui en aura le courage ?

Vous pourriez porter ce message aux prochaines élections régionales ?

Bien sûr ! D’ailleurs, mon engagement principal en Nouvelle-Aquitaine sera sur ce thème. Ce sera ma priorité !

Je souhaite qu’au moment des élections Régionales, on puisse soumettre au vote des habitants de la Région ce découpage qui a été fait sur un coin de table, à l’Elysée, un dimanche après-midi comme on joue au Monopoly.

Quand on confond démographie et démocratie, on fait le lit de la démagogie. La démagogie en politique c’est la maladie de notre société actuelle. Pour la soignée on propose de jeter la démocratie représentative aux orties, les corps intermédiaires, pour les remplacer par une démocratie  soi-disant participative qui est pour moi, une nouvelle forme de populisme. Je n’y crois pas.

Les élus ruraux, eux, sont à portée de baffe. Jean François-Poncet disait d’eux qu’ils sont « les hussards de la République » ! Mais ils sont aussi un point de repère pour les habitants.

La France pour fonctionner a besoin de repères, de modèles, de rôles bien définis, de frontières qui soient reconnus de tous. Pas d’un gloubiboulga informe dont plus personne ne comprend le fonctionnement.

Le but de tout cela n’est pas de servir une somme d’intérêts particuliers, ni même l’intérêt général du moment. Le but de tout cela est au delà, il s’agit de construire et de servir le bien commun !

C’est aussi le sens de ma candidature aux prochaines élections sénatoriales, en Gironde, en septembre 2020.

Le mouvement de la ruralité est-il européen ?

Oui ! Mais je rappelle que pour séduire Europe, Zeus s’est transformé en Taureau et que l’union a eu lieu sous un platane ! Nous voulons que l’Europe soit aussi celle des espaces et des ruralités, l’Europe des traditions locales, l’Europe de la diversité !

Nous voulons que la France assume l’Europe ! Nous dénonçons le double discours de la France selon qu’elle parle à Bruxelles ou à Paris. Nous voulons une France qui aide les français à profiter pleinement des politiques européennes au lieu de, par trop d’administration tatillonne,  leur mettre en permanence, des bâtons dans les roues.

Nous voulons une Europe sociale et solidaire qui protège et respecte ses peuples et ses Etats-nations. Une Europe qui défende le bien commun et applique réellement le principe de subsidiarité ! Notamment qu’elle respecte les usages et traditions locales, défende et soutienne ses producteurs. Que le marché commun soit accompagné des conditions d’une concurrence libre et non faussée. Vous remarquez que les mots que j’utilise sont ceux des fondamentaux de la construction Européenne : bien commun, subsidiarité, concurrence libre et non-faussée ! Il y a loin des mots à la réalité !

Nous voulons une Europe qui applique une véritable politique commune sur les grands sujets comme l’agriculture, l’énergie, l’immigration, la monnaie, et met en place un processus de convergence des politiques sociales et fiscales avec les Etats membres.

Il a quelques jours Ursula Von der Layen, la nouvelle Présidente de la commission affirmait que l’Europe était le 1er marché du monde. Et bien quand on est le 1er marché du monde on protège ses propres producteurs et on impose ses normes aux autres, notamment sa monnaie ! Ce n’est pas exactement ce qui se passe aujourd’hui !

Pour conclure, je voudrais dire que si la France est la 1ère destination touristique du monde c’est grâce à son art de vivre, à sa gastronomie, à ses vins. C’est autant pour son patrimoine matériel, que pour ses paysages, sa biodiversité et son patrimoine immatériel. Le mouvement de la ruralité entend défendre tout cela et le promouvoir !

On ne laissera pas les idéologues mettre fin à des siècles de traditions au nom d’une vérité révélée et très fugace !

Le temps ne défait pas ce qu’il a permis de construire.

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