« Aujourd’hui, les diplomates prendraient plutôt le pas sur les hommes d’action. L’époque serait aux tables rondes et à la détente. Hein? Qu’est-ce que t’en penses? »
Ainsi se remémore-t-on de cette réplique audiardesque tirée des Tontons flingueurs, qui transposée au monde politique, correspond au mal d’aujourd’hui : La technocratie, cet imaginaire politique français dirigé par la pensée unique et « en même temps » contradictoire, mise en lumière par cette crise sanitaire.
Lorsqu’en 2017, Macron entre à l’Élysée par effraction, ou par un alignement de bonnes étoiles il ne fait que balayer la poussière laissé par un système politique à bout de souffle, autant à droite qu’à gauche. Habilement, le jeune Président s’est servi de l’ancien monde pour créer et accéder à ce « nouveau monde » si prometteur. Mais finalement, il faut que tout change pour que rien ne change. Cette phrase ne se veut point réactionnaire, car on sent bien l’opportunisme qu’elle suscite par cette intelligence Élyséenne « macronisée ». Assurément, la technocratie n’a pas attendu le couronnement de Macron pour régner au sommet de l’Etat, néanmoins elle s’y est enracinée plus durablement en émoussant de nombreuses figures.
Malgré de multiples départs du gouvernement Philippe, on n’oublie trop souvent celui de l’éphémère Jacques Mézard, l’ex-ministre de la Cohésion des territoires, lors du remaniement ministériel du 16 octobre 2018. Il évoquera, en partant de son poste, un lourd et réel jugement, qui a eu trop peu d’écho dans l’enceinte médiatique : « La concentration des pouvoirs entre les mains de ce qui est perçu, à tort ou à raison, comme une technocratie, un milieu restreint, alimente la défiance et le sentiment d’abandon. »
Ces idées de Shadoks où « s’il n’y a pas de solutions, il n’y a pas de problèmes« , « si ça fait mal c’est que ça fait du bien », « Quand on ne sait pas où on va il faut y aller…et le plus vite possible », reflètent ironiquement bien notre technocratie actuelle, néanmoins lorsque la réalité dépasse la série télévisée, nous rions jaune. Comment peut-on nous faire croire que les questions politiques pouvaient être résolues d’une manière technique.
Cependant, soyons honnête, la technocratie du vieux système politique basée autrefois sur le clivage gauche/droite s’est fait la nourrice de celle d’aujourd’hui, fonder sur cette claustration manichéenne, même si le « populisme » se cogne toujours à la porte du pouvoir. Le passage du relais s’est opéré doucement dans une mécanique naturelle. La technocratie reste un chêne enraciné avec cette forte capacité d’adaptation, dont les branches mortes peuvent rester des siècles. Alors que d’autres voix d’oppositions seraient audibles à transpercer cette camisole réductrice et factice, il n’en est, hélas rien, car cet arcane où prédominent les techniciens subsistent également au sein de la droite, comme une forme de pouvoir légitimé par la technique. Le fait, est que les cadres sont, pour quelques-uns qui tiennent les rênes, déconnectés de la réalité ou du moins éloignés de leurs adhérents et donc du citoyen, du simple quidam.
Malheureusement, en définitive, on se retrouve à pouvoir faire le parallèle entre la technocratie qui nous dirige et certains caciques qui ne se remettent pas en question au sein du parti. Ils se rapprochent de ces vieux généraux qui ont gouté aux défaites cuisantes sans s’effacer pour tirer les leçons de leurs échecs. Les Barons. Les ténors, dont certains, dès le premier tour des municipales restent mal élus par une démocratie défaillante. N’est-ce pas là le comble, qui nous pousse à nous inquiéter ?
En effet, depuis quand les Français attendent une droite de reconquête, une droite dans laquelle chaque Français doit pouvoir se reconnaître. Pas un parti où, pour y adhérer et être écouté, il faudrait tous se ressembler, avoir le même caractère. Nous aurions alors, une droite renfermée sur elle-même qui signerait ainsi, une issue malheureuse.
Certes, la richesse de la démocratie participative, sait faire entendre les paroles, mais pas toutes les paroles et finalement, elle ne créer pas toutes les conditions d’une parfaite égalité. Force est de constater qu’il existe des apories où les notions de confiance et de fierté sont occultées.
La culture de l’indécision, les querelles picrocholines, les fermetures pour cause d’inventaire, les faux débats, les planqués, les renégats, les pachydermes ont laissé place à de lourde déception, entraînant les militants à suivre leur propre pente, où quel que soit le degré d’inclinaison, la chute finie toujours aux extrêmes. Ces fractures ont déclenché une méfiance des électeurs à l’égard des responsables. Elle peut nous conduire à se détourner de la vie politique et donc de soi-même.
Revenir aux bases, remettre au cœur du parti les militants, c’est là, le seul moteur, la seule force déterminante dans une bataille, le ciment des futures victoires. A quand des réunions entre un président d’une fédération et sa base ? A quand des réunions entre jeunes républicains et « anciens » militants ? A quand l’intelligence collective ? A quand le débat d’idées ? Ne serait-ce pour garder les pieds sur terre. Arrêtons avec ces appels téléphoniques nous invitant à combler le vide comme figurant, ces mails à la petite semaine et ces questionnaires orientés. La vieille mécanique par la voie digitale, c’est l’Ouroboros des temps modernes.
La droite ressemble à une voiture usée. Il n’y a qu’une véritable volonté de révision, à nettoyer les pièces, à les remplacer que l’on pourra la faire avancer. En n’oubliant jamais que seuls les pneumatiques reste le seul organe en contact avec le sol. Mais surtout, renouer avec la confiance entre le pilote et l’ensemble des constructeurs. La confiance ; ce mot si chahuté, oublié, rendu si faible. Le général d’armée Pierre de Villiers le résume parfaitement dans son livre Qu’est-ce qu’un chef ? « La confiance, c’est le refus de la résignation. C’est le contraire du fatalisme, l’antithèse du défaitisme. Et, en même temps, il y a dans la confiance une forme d’abandon. Agir sans s’abandonner, c’est faire preuve d’orgueil. S’abandonner sans agir, c’est se laisser aller. »
Cela ne se traduira pas par une confiance naïve. Elle doit s’établir sur la capacité à pouvoir, discuter librement, à arriver à se « défusionner » de ses archipels. Retrouver une base solide. Nous ne demandons pas des excuses, mais des actions fortes, pour recréer un climat serein.
Il ne s’agit pas de faire un cours de management, mais encourager l’engagement. Agir pour un but commun. Émerger des propositions concrètes avec des acteurs compétents dans leur domaine. Partager la réalité. Donner l’envie d’apprendre et de comprendre n’est pas une faiblesse, elle forge le savoir-faire. On peut accomplir beaucoup plus en travaillant avec d’autres personnes et en s’appuyant sur leur vécu. C’est là, toute la force du groupe de réflexion de la Droite de Demain : le débat, les idées, l’engagement, l’intérêt supérieur de la Nation.
André Missonnier