Roger Scruton : vivre en conservateur
Roger Scruton : vivre en conservateur

Roger Scruton : vivre en conservateur

Crédit Photo : Roger Scruton © Francesco Guidicini/The Sunday Times

Notre beau pays subi désormais, telle une colonie culturelle, la loi de la Cancel Culture. Un phénomène venu d’outre-manche caractérisé par la déconstruction de toutes les structures sociales occidentales. Les opposants à notre culture détruisent une à une nos constructions historiques et anthropologiques. Pire, les déconstructeurs ne se gênent plus de combattre les réalités scientifiques. L’apparition de la sociologie dans le champ scientifique a légitimé l’action de ces militants, cette pseudo science les a dotés d’un bagage intellectuel reposant sur la consécration du social sur le factuel ; la réalité est mise en touche, seule compte la construction sociale. Le sexe est remplacé par le genre, la différenciation sexuelle est remplacée par le non-genré, l’espèce par la race, la défense de l’environnement par l’écologisme… Tous les pans de la société y passent, un réel danger pour nos civilisations par des ennemis venus de l’intérieur, apparaît et prend de la place ; les idées s’imposent ; la bataille culturelle est là.

Roger Scruton, célèbre auteur britannique, profondément conservateur, a conceptualisé cette notion dans ce qu’il y a de plus profond. Pour cet auteur, le conservatisme n’est pas une doctrine politique, il est un art de vivre ; dans notre manière de vivre, nous sommes conservateurs. Une révélation qui eu lieu dès Mai 68, comme il le souligne dans son œuvre « de l’urgence d’être conservateur » : « Mai 68 me conduisit à comprendre ce qui avait de la valeur dans les coutumes, les institutions et la culture de l’Europe ». Il prit alors conscience du mouvement émancipateur qui allait tourner en dérives profondes difficilement réparables. Houellebecq l’identifie bien dans son roman « Les particules élémentaires », l’auteur sous fond d’un conservatisme plus pessimiste, met en exergue les conséquences désastreuses de mai 68 sur les idées par un libéralisme sociétal qui en pensant se libérer dans ses mœurs a en réalité enfermés ses apôtres dans de profondes solitudes ; la solitude étant un stade difficile à surmonter ; la communion nationale, la famille, la corporation, sont à la base les médicaments à la solitude naturelle de l’Homme. Mai 68 s’est émancipé du Général, de l’ordre ancien, mais comme dans toute révolution, les excès conduisent à l’anarchie.

Aujourd’hui, les conséquences sont désastreuses : éducation nationale qui désinfecte une plaie avec de l’eau, une liberté sexuelle à travers du porno, une culture française multiculturelle, une nation communautarisée, une culture de la télévision… L’affaire Duhamel rappelle encore plus horriblement, les travers d’une idéologie, les bas-fonds d’une culture de l’excès de la part d’une certaine élite. Les Foucault, Sartre, de Beauvoir ont détruit l’intellect français, Raymond Aron aurait dû gagner face à Sartre. Et pourtant, comme nous le constatons dans l’œuvre de sir Scruton, le communisme montrait déjà que le socialisme n’était qu’une illusion, qu’une belle œuvre littéraire, Karl Marx et Engels des romanciers, très bons certes. L’auteur l’a constaté durant son voyage à Prague, le socialisme conduit toujours à la dictature, l’égalité n’est jamais atteinte ou alors elle l’est par nécessité dans la pauvreté.

Le communisme n’est plus, mais les communistes se sont convertis aux idées de la déconstruction. La fameuse convergence des luttes a eu lieu : antiracisme, antispécisme, écologisme, néoféminisme, racialisme, indigénisme, néo-médiévalisme, bref, une cacophonie alimentée par des réseaux sociaux totalement acquis à leurs causes. Une « culture de la répudiation » comme la nommait Roger Scruton, qui dénonce fortement ce multiculturalisme, bien loin de l’idée patriotique qui porte chaque conservateur : « les odes à la gloire du multiculturalisme que l’on entend, sur tous les tons, quotidiennement, reposent en fait sur une haine du passé, de l’histoire et de la tradition. C’est une forme de « haine de soi » ». Pour le conservateur c’est en s’évadant dans le « chez soi », dans la communauté humaine, que l’Homme peut sortir de cette haine ; le conservatisme dans la vision d’un Scruton représente l’amour. L’amour des siens, l’amour de sa terre, l’amour de son pays, de son histoire, de sa Nation ! Un amour capitalistique marqué d’une possession subjective. C’est en aimant son pays que le citoyen aura la volonté de le défendre, de contribuer à sa réussite ; la détestation ne conduira qu’à une gangrène culturelle. Cet amour est essentiel dans la constitution d’une communauté nationale : « Pour moi, le conservatisme, c’est la philosophie de l’amour ! L’amour de ce qui existe, de ce que nous possédons et avons hérité », dans les mots de Roger Scruton dans un entretien au Figaro Vox. La nation est une création occidentale qui permet de réunir ces « je » dans un « nous » et sans critères aucuns, excepté l’amour de sa nation.

Le conservateur se doit d’être reconnaissant. Il admire l’héritage de ses ancêtres, en ayant la volonté de perpétuer la beauté et l’esthétisme des traditions. Le multiculturalisme cherche a démontré que notre culture est entachée du sang des autres ; notre civilisation a créé les droits de l’Homme, a aboli l’esclavagisme et a consacré l’égalité entre les sexes. Le conservateur se place donc dans cette ligne, il ne remet pas en cause les acquis sociétaux, il s’oppose à l’idéalisation du futur, à la sanctification du progrès. Un progrès oui, mais des limites éthiques aussi. Roger Scruton a peur de ce progressisme qu’il oppose à une connaissance de son histoire : « le passé est beaucoup plus inoffensif que l’avenir. Le progrès justifie tout, là où la Tradition ne demande aucune justification. D’un point de vue rationnel, l’idéalisation du futur est extrêmement dangereuse ».

Apprenons des enseignements de cet auteur, Roger Scruton, qui a mieux que quiconque compris que la destruction des barrières sociales créera à termes, une société individualiste, loin de l’amour de la communauté humaine. Cet amour, nous ne le retrouverons que dans le conservatisme. Il faudra opposer à la détestation de l’autre prônée par l’égalitarisme et à la différenciation des racialistes, un amour de l’autre par notre conservatisme.

Paul Gallard, Vice-président de la Droite de demain.

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