Il fut un temps pas si lointain, avant 2002 en réalité, où il était rare (ce n’est arrivé qu’à deux reprises seulement entre 1958 et 2002) d’observer une majorité présidentielle à l’Assemblée Nationale constituée d’un seul et unique mouvement politique. Les majorités se dessinaient d’alliances naturelles entre les socialistes et les communistes en 1981, ou entre l’UDF et le RPR en 1993. C’est le dernier de ces deux exemples qui nous intéresse ici.
Il y a quelques décennies, peu avant la fondation de l’UMP, la majorité présidentielle était diverse, se déchirant parfois sur certaines lois, mais une chose est inéluctable: les groupes politiques restaient globalement unis en eux-mêmes. Il y avait des désaccords entre l’UDF et le RPR sur certains textes, de même entre les communistes et le Parti Socialiste, mais rares étaient les « frondeurs » internes.
Il semble donc pertinent de poser la question de l’éventualité d’un retour de la droite sur la scène politique en suivant le modèle UDF-RPR.
Il apparait que la droite, si elle veut un jour revenir au pouvoir, doit réutiliser les méthodes qui ont fonctionné : à savoir, deux partis, une majorité, ayant chacun ou non un président mais l’essentiel étant de se retrouver autour d’un candidat unique à la présidentielle, faisant ainsi en sorte d’acquérir à la fois les voix du centre droit et celle de la droite; tout en ayant deux entités distinctes qui permettraient à chacun de se retrouver dans un programme présidentiel selon ses convictions. Certains désaccords sont possibles, il ne s’agit pas d’imposer l’une ou l’autre des lignes, mais simplement de constater qu’au vu de la multiplication des convictions politiques actuellement, il faille respecter chacune tout en conquérant le pouvoir avec une ligne claire.
Il ne s’agit pas, une fois la majorité UDF-RPR élue, de voter les mêmes textes d’une seule voix. Prenons pour cela un exemple actuel: sur le texte de loi de bioéthique contenant la “PMA pour toutes“, il se pourrait que certains membres d’un groupe équivalent à l’UDF de l’époque soit en phase avec cette réforme, et puissent ainsi voter en faveur du texte, alors qu’il s’agirait pour les députés du groupe RPR de s’opposer à celui-ci, au vu de ses convictions davantage conservatrices.
Il est en tous les cas clair que la question se pose aujourd’hui: savoir s’il est toujours pertinent de maintenir dans un parti un centre droit et une droite qui n’arrivent pas à s’entendre, centre droit qui, d’ailleurs, s’est largement fait siphonner par “Agir“, allié de La République en Marche.
Ainsi, l’idée émerge de deux entités nouant des alliances à la fois pour les législatives et pour les sénatoriales, mais également sur le plan local où les électeurs n’ont finalement que faire des postures nationales de leurs élus, tant qu’ils “font tourner la boutique“. Il existe dans de nombreuses villes de France, dans de nombreux départements et dans de nombreuses régions, des majorités ralliant des Républicains, en passant par l’UDI, et parfois même jusqu’au Modem (c’est le cas en Auvergne Rhône-Alpes), l’action locale ne nécessitant pas autant de convictions tranchées que l’enjeu national.
Dans cette configuration, il faudrait donc répéter ce qui a fonctionné dans les années 1980 et ce qui fonctionne encore aujourd’hui au niveau local. Ce concept aura au moins eu le mérite d’être porté au débat par l’un des prétendants à la présidence des Républicains pour les élections d’octobre.
Au vu des résultats électoraux engrangés par la droite depuis 2017, il est légitime de se poser la question d’un nouveau modèle qui pourrait rendre la droite de gouvernement à nouveau crédible auprès des électeurs.
Lucas Michalon.